Une ombre sur le Monde
Auteur Michel Zordan - Extrait : Chapitre premier - Quelques étés plus loin -Fin 1929, pour échapper à la vindicte d’un fasciste fanatique notre père décida de notre exil en France. Le 3 février 1930, la famille Montazini, Émilio mon papa, Mariéta ma grande sœur et de moi Sylvio, arriva en Gascogne. C’est au château Tourne Pique, dans la bourgade de Floréal, que nous posâmes nos valises. À peine quatre mois plus tard, le capitaine Aristide Clément Autun, propriétaire du château, proposa à papa d’acheter la ferme de L’Arcange. Délaissée depuis plusieurs années, les terres étaient réduites à l’état de friches, mais cela nous était complètement égal. Nous étions les plus heureux au monde, nous avions enfin une maison bien à nous et l’important était là… En septembre 1932, le père Guillaume, un religieux de l’abbaye de Flaran, nous expliqua l’origine du nom de L’Arcange. Au mois d’octobre 1936, ce même religieux nous apprenait que le bon roi Henri IV était venu batifoler à « l’albèrga de l’Arcangèl.
Entre Amandine et moi, la situation s’est un peu améliorée. Nous nous sommes revus au 1er de l’an de cette année et nos échanges de lettres ont repris. Je n’ai bien sur rien dévoilé de ma « rencontre » de septembre dernier avec Juliette. Pour les grandes vacances, ma blondinette n’a encore rien décidé. Pour moi, les choses sont déjà bien établies : quelques jours de battage chez les voisins, puis « farniente ». Après le 20 août je m’attaquerai au déchaumage et aux labours.
Le 14 janvier madame Éliette mit au monde le petit Martial. Deuxième grande bonne nouvelle en ce début d’année morose: le 15 mai 1938, ma grande sœur Mariéta épousa un Parisien, Julien Montesquieu, en la mairie de Floréal. Papa avait tout fait pour que la cérémonie et les festivités se déroulent dans notre bourg, et à L’Arcange. Pour l’occasion je revis Amandine, nous fîmes un peu semblant, mais nos relations restaient encore dans le flou.