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Michel ZORDAN présente des extraits de ses romans. Il se laisse également aller à quelques réflexions sur l’actualité.

20 Nov

Ping-pong fatal

Publié par Michel Zordan  - Catégories :  #Un auteur du Sud Ouest

ping-pong fatal-copie-1Auteur Michel Zordan - extrait : Se dégage de cette jeune femme  quelque chose de très particulier. Peut-être son côté asiatique qui est nouveau pour moi.  Anglaise, américaine, ou parisienne à la rigueur, oui… mais chinoise, c’est une première.  Elle bouge beaucoup sur sa chaise qui n’est pourtant pas si inconfortable que ça.  De petits mouvements, que se voudraient sans importance. Elle croise et recroise sans cesse ses longues jambes. De nouveau « attention danger ». Dans ma tête le panneau ne cesse de clignoter à l’orange bien mûr,  et bientôt une petite voix l’accompagne.  Cette petite voix m’avertie que la fille est très dangereuse, et que je ne dois pas laisser ma libido gambader sans une laisse. Elle me conseille même de l’équiper d’une muselière.  Ça va j’ai compris, je me suis fait piéger à plusieurs reprises, mais la leçon a porté, et maintenant je gère. Puis son parfum prend le relais, léger mais en même temps très envoûtant, ensorcelant, troublant. À croire que  le diable s’est glissé dans le corps de cette bimbo. Ou le contraire, je ne sais plus trop bien.  Je dois redoubler de vigilance.  Le panneau passe  rapidement au rouge. La sirène ne retentie pas encore, mais c’est limite.

 

–  Mademoiselle Chan Yuan,  quels sont vos intérêts dans cette affaire ?  J’ai comme l’impression que vous travaillez pour Li Xiong, et que vous êtes chargé de déstabiliser ses adversaires !

 

–  Non, pas du tout, je  suis journaliste au Quotidien de New-York et je fais une enquête sur Li Xiong, mais il est encore trop tôt pour en parler.

 

Vous souhaitez que je vous dise tout, juste parce que vous prétendez être journaliste !  Désolé mais c’est une affaire d’ordre privé. À moins que puissiez m’aider et plutôt que vous puissiez nous aider à contrecarrer ses plants !  Vous cherchez quoi sur ce bonhomme ? Pour qu’une journaliste se déplace de New-York, ça doit être très important !

 

La demoiselle Chan Yuan continue ses petites gesticulations.  Pas de grands mouvements, mais ils sont brefs et incessants.  Ses gambettes se font et se défont à un rythme très calculé et  parfois très haut. Peut-être la chaise après tout ! L’ancien ne convient pas à tout le monde.  Réflexion faite, je crois juste que cette fille est là pour me mystifier, sinon pour quelle raison croiserait-elle ses jambes aussi haut ? Mon bonhomme, si tu n’as pas encore comprit ça, c’est que ton cerveau est déjà frit. Réagit et vite !

 

–  Désolé monsieur Beaumont mais je ne peux pas vous en parler. Quant à vous aider,  je …  De toute façon, pour lui vous êtes trop petit, trop tendre. Malgré son gabarit, c’est un ogre et il a de très gros appétits. Lorsqu’il le décidera, il mettra sa machine en marche et rien ne l’arrêtera.  Au revoir monsieur Beaumont.

 

Sans délai la jeune femme se lève, mais elle hésite à partir, comme si elle souhaite encore ajouter quelques mots et faire quelques impressions. Bien plus grande que je ne le pensais.  Même debout le bas de sa robe remonte encore très haut sur ses cuisses, qui ne sont pas si mal et même plus que bien. Très beau châssis la demoiselle.  Ce n’est qu’à cet instant que je remarque son sac à main de grande marque qu’elle n’a pourtant pas cessé d’exhiber. Je remarque aussi ses boots noirs à trois boucles et semelles à talons hauts, qui contrastent du tout au tout avec sa robe fuchsia. Sa coiffure aux cheveux raides colorés d’un rouge cuivré, ne laissant apparaitre qu’une petite parcelle d’œil droit, accentue encore son style bimbo. Un très bref instant un timide petit sourire éclaire la commissure de ses lèvres. Machinalement elle me tend une carte, que je prends. Puis elle se tourne et s’éloigne, balançant son petit fessier de façon pas tout à fait naturelle. Son déhanchement ressemble à s’y méprendre à un leurre très coloré pour brochet, manipulé par une main experte dans des eaux un peu troubles. Je dois sur le champ faire appel à toute mon énergie renonciatrice. Je dois me faire violence,  après il sera trop tard. Elle se croit où la chintok, Saint-Jean c’est pas un bordel de Nankin. Je pense tout simplement à Nankin, parce que j’ai récemment lu un article sur la prostitution dans cette ville de Chine. Sans trop m’en rendre compte, je tente d’être méchant,  de me tisser une carapace. Pas question de céder une fois de plus à la tentation. Dans mon esprit cela ne fait plus de doute, cette Chan Yuan oeuvre  pour Li Xiong. Une question éclaire alors mon cerveau : si le bonhomme est aussi puissant qu’elle le prétend, pourquoi diable envoyer un émissaire  dans le but de déstabiliser l’adversaire ?  Elle est là la stratégie du chinois, cette fille vaut moins cher qu’une batterie d’avocat. Alors il l’utilise, espérant qu’elle pourra éliminer les premiers obstacles, le tout-venant. Les autres, il pense les réduire grâce à ses moyens financiers. J’essai de me convaincre, mais je n’y arrive pas vraiment. Ses incessants mouvements  auraient-ils déjà commencés leur œuvre malfaisante ?  J’en ai bien peur.  Machinalement je regarde la carte, seuls y figurent,  un nom,  le sien, avec un numéro de téléphone. Je la glisse dans la poche de mon jeans.

 

Lorsque Virgile s’approche pour prendre la commande, mes yeux sont encore à suivre le leurre Chan Yuan, qui déjà atteint sa voiture. Une petite japonaise garée  plus bas sur le parking. Elle ouvre la portière, tombe son petit derrière sur le siège et replie ses longues jambes dans un geste très...très calculé et… La garce sait que je n’en loupe pas une miette. Virgile également…

 

–  Martial, je sais que les filles et toi, c’est plutôt du rapide. Américaine, anglaise, parisienne… tueuse, racketteuse… Je sais que tu fais pas dans l’ordinaire…C’est qui cette fois… Avant de la congédier tu aurais pu attendre et me la présenter !  

 

 

À l’instar du sermon du curé, les paroles de Virgile ont l’avantage de remettre mon cerveau dans le droit chemin… enfin presque. 

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