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Michel ZORDAN présente des extraits de ses romans. Il se laisse également aller à quelques réflexions sur l’actualité.

04 Feb

Meurtre à la couette ou du foin sur le green

Publié par Michel Zordan  - Catégories :  #Littérature, #roman, #Un auteur du Sud Ouest

 meurtre à la couetteCher monsieur pour les plus riches il n'y a pas d'alternative,  devenir encore plus riches est vital. Il faut impérativement  trouver l’argent chez les moins riches, et chez les pauvres qui en ont encore un peu. 

 

 

Extrait 5 - Apparemment Abbott ne souhaitait rien changer, pour lui 20% distribués aux autres actionnaires, c’était déjà beaucoup. Au fur et à mesure que le niveau de la bouteille descendait, l’homme apparaissait de plus en plus excédé. Le ton de sa voix montait et devait maintenant s’entendre jusqu’à la piscine.  Je le laissai parler, quelques verres permettent parfois d’en apprendre beaucoup, sur la personne qui les ingurgite.

 

 

 – Vous les français vous ne comprenez rien, mais vous n’êtes pas les seuls, la plupart des pays occidentaux ne comprennent plus rien au monde d’aujourd’hui. Leurs repaires datent du deuxième millénaire et nous sommes dans le troisième millénaire.  Vos démocraties sont vieillissantes, et répondent à des critères complètement obsolètes. Pour prendre le pouvoir dans vos démocraties, il faut absolument distribuer et distribuer toujours plus, vous ne pouviez qu’arriver dans une impasse. Regardez où vos belles démocraties vous ont entrainés, vous êtes au bord du gouffre.  Le social bien pratiqué c’est du business, trop de  social c’est un suicide collectif. Les pauvres,  il faut leur laisser de quoi les exploiter, ils doivent avoir l’illusion de posséder un petit quelque chose, alors ils s’échineront pour le défendre.  S’ils n’ont  plus ça, ils ne servent plus à rien.  Même aux Etats-Unis les choses ne sont plus ce qu’elles étaient, et le pays va très mal, sauf  pour nous les riches,  il nous rapporte encore beaucoup d’argent.  Un pays ne peut pas aller de l’avant en traînant les pauvres diables derrière lui, c’est comme à la guerre avec les blessés, ça retarde les opérations.   Les pauvres,  les blessés  c’est du pareil au même, s’ils ne peuvent plus servir à rien,  il faut les laisser sur le bord de la route, c’est la survie du pays qui est en jeu.  On gagne avec ceux qui avancent,  et ceux qui gagnent ; ceux qui n’avancent plus et qui ne gagnent plus  ne servent plus à rien, ils sont inutiles et ils handicapent les autres.  Regardez les pays qui avancent aujourd’hui, ce sont ceux qui ne font pas dans le sentiment, la sensiblerie ils ne connaissent pas,  et ils gagnent. 

 

Abbott attaqua une deuxième bouteille de scotch, son accent texan était encore plus marquant. Pour le discours il ne variait pas, le vitriol était son ami intime et il en usait.

 

– Il faut être lucide, nous sommes en guerre, tous les pays sont en guerre les uns contre les autres, même les alliances entre pays ne sont que des leurres. Chacun essayant juste de, comment vous dite en France, de baiser l’autre.  Avec la  mondialisation  les riches ont fait un très grand bon à l’avant.   Et oui dans les pays en voie de développement certains éléments sont aujourd’hui moins pauvres,  grâce à nous,  je tiens à le signaler (les banques pour les pauvres c’est aussi nous)  et ils commencent à être intéressants pour nous, les riches. Nous leur vendons de la technique, des machines et nous achetons de la main d’œuvre et des matières premières à pas cher, c’est tout bénéfice. Attention, beaucoup reste encore à faire et  nous ne devons surtout pas baisser les  bras.  

 

Cher monsieur pour les plus riches il n’y a pas d’alternative, devenir encore plus riches est vital. Il faut impérativement  trouver l’argent chez les moins riches, et chez les pauvres qui ont encore un peu.  Regardez autour de vous,  tout est structuré de manière à faire remonter l’argent vers le haut. Les filières sont maintenant bien au point, mais il nous  faut sans cesse les perfectionner.  Un exemple parmi tant d’autres, regardez vos supermarchés, vous pensez qu’ils sont là pour vous permettre d’acheter moins cher. Illusion mon cher monsieur,  ils collectent les fonds au plus profond de vos provinces par l’intermédiaire de leur magasin, les petits,  les moyens et les grands magasins, tout est bon.  Et les bénéfices remontent vers le haut, vers les plus riches. Et mieux encore,  puisque les riches qui détiennent les supermarchés exploitent de tous les côtés, ils exploitent ceux qui produisent grâce à leurs centrales d’achats, leurs employés et leurs clients grâce à leurs magasins, du très grand art.  Et tout le monde y court dans nos magasins, tout le monde est très heureux de faire grossir un peu plus chaque jour les plus riches d’entre nous.  Regardez-bien autour de vous cher monsieur, tous les secteurs d’activités sont maintenant structurés de la sorte. Regardez dans les rues de vos villes, dans les centres commerciaux, dans vos zones industrielles, toutes les entreprises font partie d’un groupe.  Et les groupes sont des pompes mises en place par les riches. Prendre l’argent à sa source, installer une pompe et le faire remonter vers le haut, il n’y a que ça de vrai.  Vos gouvernements sont impuissants, même s’ils nous taxent à l’arrivée, pour,  comme ils disent répartir les richesses, il ne faut pas perdre de vue que nous possédons toujours les outils pour refaire de la richesse supplémentaire en exploitant encore plus  ceux qui sont exploitables. Les outils pour produire les richesses, l’important est là et seulement là.  Le problème c’est quand vos gouvernements taxent trop  ceux qui ne  possèdent plus tout à fait  les outils pour refaire des richesses, alors ils en font des pauvres, et trop de pauvres ça peut devenir gênant. Vos gouvernements n’ont pas compris que pour ralentir  le mouvement, ils devaient impérativement répartir les richesses avant même qu’elles ne soient produites. En quelque sorte,  ils devraient commencer par mieux répartir les outils permettant de créer les richesses.  Mais nous sommes tranquilles, ils ne le feront jamais parce qu’ils n’y comprennent rien, ils  n’ont aucune imagination,  et  quoi qu’ils en puissent en dire ils ont de moins en moins de pouvoir. Un simple exemple : si demain  une grosse entreprise veut délocaliser pour plus de rentabilité, personne et surtout pas vos élus ne pourront s’y opposer. Ils auront beau vociférer, menacer, rien n’y fera, et si un jour cette  même entreprise veut revenir, vos élus feront des courbettes. Vos démocraties sont vieillissantes, et répondent toujours aux problèmes avec les mêmes armes obsolètes.  Nous sommes à l’époque des missiles interplanétaires et vos démocraties en sont encore aux vieilles épées rouillées.   Vous ne pouviez qu’arriver dans une impasse.  Mais cette impasse, nous l’avions prévu et elle nous rapporte beaucoup d’argent.  Je m’explique,  vos pays vivent sur le déficit et l’argent de ce déficit c’est nous, les riches  qui le prêtons.  Pour « acheter » ceux qui les mettent en place, vos élus distribuent cet argent qui fini par retourner dans nos « pompes » magasins  et autre structures. Le plus drôle c’est que nous gagnons sur les  deux tableaux, puisque nous faisons payer à vos états des intérêts de plus en plus forts suivant la santé du pays. Et plus le pays est malade et plus nos taux sont élevés.  Nous gagnons des deux côtés, donc nous augmentons encore nos richesses, c’est imparable mon cher monsieur, imparable. Le seul problème  serait qu’un état dans l’impasse, tombe au fond du gouffre, mais bon nous veillons au grain.

 

Voilà où notre monde en est, je dirais plutôt votre monde cher monsieur, parce que moi j’ai décidé depuis longtemps d’être du côté de ceux qui pompent, pas de ceux qui sont pompés. L’important monsieur Beaumont c’est d’être au-dessus de la mêlée, pour  voir comment elle évolue et réagir en conséquence.  Savez-vous pourquoi et comment j’ai fait fortune monsieur Beaumont, parce j’ai su métriser la chaîne d’un bout à l’autre.   De la production à grande échelle à la vente à grande échelle, j’ai toujours tout contrôlé,  pas d’intermédiaire à  convaincre et à engraisser,  c’est ma devise. 

 

Mes propos vous semblent sans doute abominables, mais je suis juste réaliste. Je sais ou se trouve mes intérêts, et je sais que parfois il faut pactiser avec l’adversaire et s’en faire un allié.   Je vous ai fait une proposition, à vous de voir. Ce golf je le ferais, et le ferais ici à Saint-Jean, si vous souhaitez en être et posséder des parts vous n’avez qu’un mot à dire. Vos parents pourraient avoir une retraite dorée, ici même à Saint-Jean.  Ils ont été exploités toute leur vie,  je crois qu’ils méritent bien ça. Vous savez monsieur Beaumont,  prendre un peu d’argent aux riches, ça peut rapidement devenir très jouissif.

 

 

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