Les stylos-bille
Roman de Michel ZORDAN michel@zordan ISBN 979-10-92612-02-8
Extrait : Madame la journaliste,
Je dois d’abord vous dire que je ne suis pas une graine de voyou, comme vous l’avez écrit dans votre dernier article. Cela m’a fait énormément de peine de lire ça. Je ne suis qu’un enfant de huit ans et un enfant, ça doit obéir. Il y a des passages dans votre article qui m’ont paru assez loin de la vérité. Par exemple, la façon dont s’est déroulée l’attaque, la lumière que grand-père a allumée, les fusées anti-grêle, les coups de feu, les armes utilisées, moi j’ai tout vu de l’intérieur. Pareil pour ce qui s’est passé par la suite avec le pauvre Henrik. J’ai bien compris qu’une personne, qui prétendait en savoir beaucoup, vous informait. Mais elle vous informe mal, peut-être a-t-elle ses raisons ! Maman voulait que je reparte avec elle et Réglisse à la ferme Etchebéry, mais grand-père s’y est opposé. Pourtant, maintenant je ne suis plus en danger. Grand-père parlait assez fort, il avait l’air en colère. Je l’ai entendu discuter de service rendu, de part d’héritage. Alors je ne sais plus trop quoi penser. Maman pleurait lorsqu’elle m’a quitté et moi aussi. Même Réglisse était triste. J’aimerais bien vous rencontrer pour vous dire la vraie vérité sur ce qui s’est passé exactement. Vous vous rendriez compte que je ne suis pas une graine de voyou, mais juste un enfant qui obéit à ses parents. Et comme mon père n’est pas là, c’est à mon grand-père que je dois obéissance. Pour l’école, je vais tous les jours à pied chez monsieur et madame Sourtis. Ils sont gentils bien sûr, mais je ne vois plus mes copains. Mais pour ça aussi, je dois obéir à grand-père. Pour le trajet, je passe par les traverses et je coupe la route de Floréal au lieu- dit « la Gare ». Tarzan a reçu une vilaine blessure, mais maintenant il va mieux et à partir de lundi, il m’accompagnera. Alors si vous voulez savoir la vérité, vous n’avez qu’à venir à mon rendez-vous. Le samedi, c’est mieux parce que je quitte la ferme des Bîmes vers quatre heures, on aura plus de temps. Je ne souhaite pas que l’on nous voit discuter ensemble, vous comprenez pourquoi. Alors, vous pourrez garer votre auto dans le pré, juste à coté de l’étable des Malcœur derrière la grosse haie. Moi, je serai dans la cabane tout au fond. À cette heure- là, ils sont encore à faire du bois, il n’y a personne. Signé : un anonyme
– Alors Baptiste, tu en penses quoi ?
– C’est plutôt bien, je ne dis pas trop du mal de toi et en même temps, elle peut lire beaucoup de choses entre les lignes. Je crois qu’elle viendra !