Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Michel ZORDAN présente des extraits de ses romans. Il se laisse également aller à quelques réflexions sur l’actualité.

03 Dec

L'héritière du royaume de Rafaï / 6

Publié par Michel Zordan  - Catégories :  #Un auteur du Sud Ouest

Ce nouveau roman sera disponible chez nos amis libraires, début 2012.

 

case-afrique-3.jpgExtrait chapitre 6- Lorsque je refaisais surface,  j’étais menotté,  à plat ventre  à l’arrière d’un GMC, au milieu de voix qui conversaient. Ma tête bouillonnait, j’avais l’impression d’être passé dans une essoreuse.  Je tentais d’ouvrir les yeux, après un petit flottement le droit entrevit  des rangers, puis un canon.  Le gauche refusa obstinément, un liquide engluant les paupières, peut-être du sang.   Elle était où, ils en avaient fait quoi ?  Je m’entendis poser la question.

 

– Alors le français, tu t’ais payé du bon temps, mais c’est terminé. Bon, la pute n’était pas mal, je te comprends un peu, mais maintenant c’est terminé !

 

– Répondez bande de salopards, elle est où bordel ?  Vous en avez fait quoi ? 

 

Je gesticulais, tentais de me relever, puis je perdais de nouveau connaissance.  Lorsque je reprenais conscience j’étais toujours à plat ventre sur le plancher d’un camion. Mais les soldats m’avaient bâillonné et passé une cagoule sur la tête,  m’empêchant de voir et de parler.  Je ne sais pas depuis combien de temps nous roulions, puis bercé par le ballotement du camion, je m’endormis.  Je me réveillais lorsque je me sentis soulevé.

 

Bande de salopards, elle et où ?

 

Pour toute réponse, je reçu un coup violent sur la nuque. Lorsque je me réveillais je n’avais plus ni cagoule, ni bâillon,  je me trouvais dans une geôle qui empestait, quoi je ne saurais trop dire. La cage n’était  éclairée que par une fenêtre étroite munie de barreaux.  Trois autres hommes étaient là,  assis, dos appuyé contre le mur. 

 

  Alors le français, tu refais surface.  On ne savait pas trop si tu allais te réveiller, alors on s’est partagé ta part de bouffe. T’as pas de chance on vient juste de terminer, j’en ai encore un peu entre les dents, si ça te dit !

 

Un marrant celui-là. L’instant d’après, j’entendis une salve d’armes à feu, elle provenait de l’extérieur du mur,  juste derrière nous.  Et rebelote,  le marrant repartit pour un tour.

 

   La prochaine sera peut-être toi le français, ici nous sommes tous condamné à mort.  Dans ce pays ils ne s’embarrassent même pas avec un procès. Leur méthode  a quand même des avantages.   Moins d’avocats, moins de juges, les prisons sont moins engorgées. Ils dépensent moins d’argent, et ils en ont plus à se partager. Dis-moi, ils t’ont salement amoché, c’est rare de voir des soldats  français ici ! T’a fait quoi pour en être arrivé là ? Tu serais pas un peu impliqué dans cette affaire de coup d’état, chez nos voisins !  D’après ce que j’ai pu comprendre, ils ont eu très, très peur. La contagion s’est fait ressentir jusqu’ici. Alors, ils éliminent au moindre soupçon de peur d’être accusé de complicité par Bokassa.  Non, ne me dit pas, laisse moi deviner, ça va m’occuper un peu.  T’es un mercenaire, et tu…

 

J’y étais, l’odeur nauséabonde dans la cellule, c’était l’odeur de la mort.  Le prisonnier n’eu pas le temps de terminer sa phrase, qu’une clé tournait dans la serrure. En moins de 10 secondes, l’homme qui parlait trop avait disparu, emporté comme un fétu de paille par quatre mains.  Moins de deux minutes  plus tard,  nouvelle salve.  Le malheureux n’avait même pas eu le temps de digérer ma part de bouffe. Dommage, je ressentais maintenant comme un petit creux.  Apparemment les deux autres prisonniers  n’étaient pas des bavards, ou alors ils ne parlaient pas le français, ou alors ma gueule ne le revenait pas.

 

Lorsque le lendemain matin,  au petit jour, la clé tourna de nouveau dans la serrure, j’aurai juré que c’était pour moi, et c’était bien pour moi.  Mais l’attitude des soldats étaient différentes.   

 

  Suis-nous le français !

Commenter cet article

Archives

À propos

Michel ZORDAN présente des extraits de ses romans. Il se laisse également aller à quelques réflexions sur l’actualité.