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Michel ZORDAN présente des extraits de ses romans. Il se laisse également aller à quelques réflexions sur l’actualité.

22 May

Jean, Maître de chai

Publié par Michel Zordan  - Catégories :  #Michel Zordan, #Un auteur du Sud Ouest, #Jean, Maître de chai, #collection contes et légendes, #Les justiciers de Saint-Jacques

Collection contes et légendesLes justiciers de Saint-Jacques - Nous sommes en l’an 1357, la France traverse le  conflit  le plus long de son histoire : la Guerre de Cent Ans. Depuis la capture à Poitiers, par les Anglais,  de Jean II le bon, tout le pays est à feu et a sang. Les bandes de voyous s’en donnent à cœur joie.  Charles,  le dauphin, ne sait plus où sont ses amis,  et ses ennemis. Un conseil de trente-six membres est institué, le prévôt des marchands, Étienne Marcel tente de faire face.  Édouard Plantagenêt, plus connu sous le surnom de Prince Noir, conte de Chester, duc de Cornouailles,  est le fils aîné d' Edouard III d'Angleterre et de Philippa de Hainaut. Il a débarqué  à Bordeaux voici deux années, en septembre 1355. Son père, le roi,  lui a donné pour mission de défendre les intérêts de la couronne en Guienne.  Le voyou s’y emploi avec une certaine véhémence et même plus.   Son surnom, il ne le doit pas qu’à la couleur de son armure, comme certains le prétendent.  Son surnom, il le doit à son âme, qui ne peut pas être plus noire. En quelques semaines, de Mongiscard à Carcassonne,   de Montpellier, à Béziers et Narbonne,  il commet des actes d’une terreur absolue.  Le 20 octobre, 1355, il s’attaque à  Castelnaudary.   La petite cité résiste, alors pris d’une rage folle,  il entreprend de la détruire pierre après pierre. Lorsque plus un mur n’est debout,  il fait aligner tous les prisonniers mâles de 10 ans et plus et ordonne de les passer au fil de l’épée.  Son but n’est pas de rallier les récalcitrants à la couronne anglaise, mais de les terroriser. La réputation du prince Noir est faîte. Par couardise, ou par opportunisme,  ou les deux, un très grand nombre de seigneurs de Guienne, petits et grands, lui font allégeance, et lever une armée encore plus puissante n’est qu’une formalité.  Pour asseoir plus encore son autorité, et celle de l’Angleterre, la Grande Bretagne, il fait même débaptiser certaines bourgades, pour les rebaptiser avec des noms plus… plus  anglais.   Villecomble-d'Armagnac devient ainsi, Bretagne d’Armagnac. 

 

Je suis Jean, Maître de chai, enfin  j’étais … au château Lapeyrade, fief du marquis de Villecomble. C’est un mardi  du début du mois d’octobre de  l’an 1357, entre chien et loup, que je parviens enfin à Madiran, petite bourgade du piémont pyrénéen. Je devais m’éloigner,  ma seule idée sur l’instant,  m’enfuir au plus vite. J’ai alors réuni quelques guenilles, quelques nourritures, et j’ai quitté la petite grange dans laquelle un ami m’avait recueilli et caché à Lagraulet. Ils auraient fini par me retrouver, alors j’ai fait ce que je devais faire, partir.  C’est seulement après deux ou trois lieues que l’idée m’est venue. Je ne pouvais pas aller nulle part, sans but, c’est alors que l’idée d’entreprendre un pèlerinage à Compostelle m’est venue. Depuis mon départ, j’ai marché sans discontinuer. Je ne me suis accordé que quelques haltes, au hasard des granges et des abris rencontrés aux abords du chemin. La pluie, je suis parti avec, elle m’a accompagné tout du long. Douze lieues que je marche et douze lieues qu’elle me trempe de la tête aux pieds. Arrivé à Madiran, je n’en peux plus, la grande rue est déserte, mais j’avise l’échoppe du talmelier.

– Bien le bonjour talmelier, j’arrive de bien loin, je tombe sous la fatigue, peux-tu m’indiquer un endroit ou je pourrais reposer et sécher ma pauvre carcasse ! J’ai quelques sous, je peux payer pour un bol de soupe et une paillasse. Je peux même aider !

– Bien le bonjour pèlerin, c’est ma foi vraie  que tu as l’air fatigué et mouillé comme une panosse. Tu peux toujours te rendre au monastère,  les  vendanges sont à peine commencer. Le travail ne manque pas, et tu n’as pas l’air d’un fainéant. Si tu les aides, les moines pourront sans doute te garder quelques jours.  Le temps de te refaire une santé. Leur vin est très bon, enfin, le blanc… le rouge, si tu le bois avant le solstice d’hiver, ça peut aller, après il te tord l’estomac, plus encore que l’arsenic. 

C’est frère Eustache qui me reçoit. Les pèlerins sont de la main-d’œuvre pas chère, et qui se contente de peu, encore faut-il pouvoir les retenir. 

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