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Michel ZORDAN présente des extraits de ses romans. Il se laisse également aller à quelques réflexions sur l’actualité.

13 Jan

Les trois faces du miroir

Publié par Michel Zordan

- La démocratie est un personnage imaginaire à deux jambes. En France, révolution oblige, on les a baptisés, la gauche et la droite. Les élections sont là pour en renvoyer une au repos, pour lui permettre de se recharger, pendant que l’autre accède aux responsabilités. Se recharger ne veut pas dire rien faire. L’opposition à un boulot très important qui consiste à critiquer le gouvernement en place, à le maintenir sous pression pour éviter qu’il ne légifère trop en faveur de son camp. Attention, critiquer ne veut pas dire, être obligatoirement contre. Pas à pas, cahin-caha, la démocratie avance, lentement, parfois par à-coups, mais elle avance sûrement, en prenant son temps. Prendre son temps est très important pour une démocratie. Chaque camp doit se satisfaire à son tour, un coup pour l’un, un coup pour l’autre. Le problème surgit lorsque la jambe au pouvoir s’use trop vite, s’affaiblit, ou qu’elle ne remplit plus sa tâche, ou que les mesures prises se trouvent trop excentrées, ou qu’elle reste trop longtemps au pouvoir. Cela veut dire que l’autre jambe, celle au repos, dans l’opposition met trop longtemps à se requinquer, ou parce qu’elle ne fait pas son travail d’opposition, ou pour de multiples autres raisons. Alors les tensions se cristallisent, s’exacerbent. Chacun se recroqueville sur ses positions, et nous voyons apparaître le spectre de l’extrémisme, avec ses solutions radicales. Le terrorisme se nourrit des faiblesses de la démocratie. Et c’est ce moment que choisissent nos ennemis, pour nous attaquer, pour tenter de nous déstabiliser plus encore, et nos services sont là, dans l’ombre pour servir la nation et parer aux attaques de nos ennemis. Je ne dis pas ça comme un simple avertissement, mais plutôt comme une menace, nous serons sans pitié pour nos ennemis. Je précise à leur intention que nos méthodes ne sont pas toujours des plus conventionnelles. Notre but étant de leur barrer le chemin, par tous les moyens.

 

Des applaudissements retentissent, je ne m’attendais pas à ça. J’ai très largement dépassé le cadre de mes attributions, et je sais que mon discours ne va pas plaire au Premier ministre et à bien d’autres. Mais pour le moment, mon problème est d’amener nos adversaires à la faute. Je sais qu’ils m’écoutent, peut-être même sont-ils parmi les spectateurs. Le lieutenant Audebert joue parfaitement son rôle, elle paraît s’intéresser à l’émission, mais je sais qu’elle ne perd pas vu l’auditoire.

 

L’émission se termine, sans que rien de très particulier ne se passe.

 

Les documents scannés dans l’enveloppe n’ont encore rien révélé de leurs secrets. Pourtant nous sommes certains qu’ils en cachent. Jeudi matin, nous avons un appel d’un commissariat de Saint-Ouen. Abdoulaye Bakary, notre Malien fugueur a été repéré hier en début de soirée, dans un squat Boulevard Biron. Il a été contrôlé et a exhibé le courrier que je lui ai remis. Nous n’avons été avisés que ce matin. Je donne pour ordre de l’arrêter, mais très discrètement. Trop tard, lorsque les policiers le retrouvent dans son nouveau squat, crâne fracassé. Il a cessé de vivre.

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